Autonomisation des organisations à base communautaire au Cameroun : expérimentation, défis opérationnels et pistes de réformes pour une transition humanitaire par le bas
Cette recherche vise à objectiver le processus de transition humanitaire par le bas, tel qu’observé aujourd’hui au Cameroun, à partir de l’expérience des organisations à base communautaire (OBC) soutenues par les ONG internationales, et bailleurs de fonds bilatéraux et multilatéraux
Étudier les organisations à base communautaire vectrices de la transition humanitaire.
Cette recherche vise à montrer comment la transition humanitaire s’opère directement par le bas (bottom-up) à travers les organisations à base communautaire, alors qu’autrefois, l’attention avait toujours été orientée vers l’autonomisation de l’action de l’État et des ONG nationales et locales. Ce basculement vers les associations de réfugiés, de personnes déplacées internes et populations hôtes, longtemps caricaturées de passives et de dépendantes, marque l’intérêt heuristique et scientifique de cette recherche. Il s’agit donc de déconstruire cette image victimaire attribuée à ces groupes (groupes de femmes, de jeunes etc.) en montrant comment leurs capacités d’agir et leur voix peuvent être amplifiées, via des cadres associatifs. À partir d’une approche éthique, elle montre comment certains bailleurs de fonds orientent progressivement leurs financements vers la structuration des OBC, leur accès aux micro-subventions innovantes et leur implication dans les réseaux et plateformes d’action collective.
Adapter la méthodologie aux zones de conflit
Cette recherche se déroule dans cinq régions du Cameroun (Extrême-Nord, Est, Littoral, Sud-Ouest et Nord-Ouest) pour toucher environ 100 organisations à base communautaire. Dans chaque organisation, 02 focus group seront menés, ce qui représente en tout 200 focus group genrés. Des entretiens semi-directifs seront également menés avec 150 informateurs clés issus de diverses agences onusiennes, ONG, structures étatiques et du monde des bailleurs de fonds. Ces techniques vivantes seront complétées par une minutieuse recherche documentaire. En ce qui concerne les deux zones anglophones de l’Ouest du pays en conflit, la méthodologie a dû être adaptée. Suite aux recommandations gouvernementales, une stratégie de recherche sensible au conflit a été édictée. Elle privilégie une collecte de données à distance et une délocalisation des réunions avec les répondants et parties prenantes, pour, au mieux, minimiser les risques d’exposition aux menaces sécuritaires.
Contribuer à la recherche sur l’autonomisation des OBC
La question de l’autonomisation des OBC reste encore très marginalement traitée dans la littérature scientifique existante. Les travaux à ce jour disponibles n’abordent que de manière très parcellaire le sujet. Or, un besoin d’élucidation de cette réalité sociale semble perceptible et saisissable au Cameroun. L’enjeu de cette recherche vise donc à placer les OBC (le plus souvent constituées des réfugiés, des personnes déplacées internes et des membres des communautés hôtes) au centre d’une transition humanitaire par le bas, pour trouver des solutions avec les populations elles-mêmes, à travers la création de nouveaux partenariats innovants. Elle poursuit donc l’objectif de porter sur les fonts baptismaux un nouveau modèle opérationnel permettant désormais aux organisations à base communautaire d’accéder elles aussi aux subventions directes.
Biographie
Jean Émile MBA est Docteur/PhD en Science Politique, spécialisé en Études Internationales. Chercheur associé au Centre d’Études et de Recherche en Paix, Sécurité et Intégration (CERPSI) de l’Université de Maroua (Cameroun). Ses travaux portent essentiellement sur l’action humanitaire internationale ; les questions migratoires ; les dynamiques transfrontalières et les interférences conflictogènes. Mais aussi sur les questions de genre et d’inclusion ; d’éducation et de protection en situation de crise. Praticien au statut mixte, il se déploie dans un aller-retour permanent entre la recherche et l’action, pour une alliance et une reconnaissance mutuelle entre les champs académique et humanitaire, afin de passer de la méfiance à l’efficience.
Crédit photo : ©Jean Émile MBA