Le projet de recherche

L'exil au quotidien. Trajectoires genrées, recompositions familiales et processus d’installation des Ukrainiens en France

Cette recherche sur l’exil des Ukrainiens et Ukrainiennes s’articule autour de quatre axes : Dynamiques d’installation et évolution du projet migratoire ; Sélectivité des arrivées vers la France ; Genre et migration ; Faire et refaire famille.

 

Contexte, enjeux humanitaires et sociaux, et problématique

 

En dépit d’une relativement faible présence de réfugiés en provenance d’Ukraine sur le territoire français au début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, leur nombre a augmenté au fil des mois. L’activation de la directive européenne pour accueillir les réfugiés ukrainiens et l’organisation mise en place en France a permis d’élargir et d’améliorer les conditions d’accueil. Le nombre de personnes qui ont bénéficié d’une protection temporaire est ainsi estimé à environ 100 000.

 

C’est dans ce contexte que nous avons souhaité enquêter sur la nature voire la spécificité des trajectoires migratoires et d’installation des réfugiés ukrainiens à Paris et en région parisienne :

  • Quelles sont les déterminants et caractéristiques des trajectoires migratoires des exilés ukrainiens qui arrivent en France ?
  • Comment s’organise leur expérience quotidienne de l’exil, entre ici et là, et quelles sont leur pratiques spatiales et d’ancrage au quotidien ?
  • Comment les projets migratoires évoluent-ils au fur et à mesure de l’installation et en contexte de précarité et d’incertitude ?
  • Comment se construisent les pratiques intimes, familiales transnationales dans le contexte de l’exil et dans des situations d’hébergement et, plus largement, d’installations instables ?
  • Quel est l’impact de la variable du genre dans les dynamiques d’exil et les dynamiques sociales transnationales observées ?

 

Terrain de recherche et méthode d’investigation

 

Cette recherche s’appuie sur des entretiens biographiques et des focus groups. La langue de l’enquête est essentiellement l’ukrainien. Le projet étant porté par un laboratoire de géographie, une attention particulière est attachée à la dimension spatiale des trajectoires et de la vie quotidienne des réfugiés. Le projet comporte une dimension cartographique et donne lieu à la réalisation de cartes mentales auprès des réfugiés. Des chercheurs exilés, accueillis par le laboratoire Géographie-cités et l’EHESS, sont incluss dans l’équipe.

 

Les intérêts de la recherche pour les acteurs humanitaires et sociaux et pour la recherche

 

Les enjeux de cette recherche permettent d’analyser de manière fine et détaillée les situations des exilés d’Ukraine en France et d’amener à informer la décision publique en matière d’accueil et d’intégration des exilés notamment dans le système scolaire et universitaire, d’accès à la santé physique et mentale, et au marché du travail.

 

Dans un contexte de crise en constante évolution et de guerre, l’étude des situations d’exil en permanente reconfiguration offre un intérêt à la fois scientifique et sociétal fort. La recherche sur l’exil ukrainien constitue une opportunité unique de comprendre les modalités d’installation d’un collectif essentiellement féminin, dont la permanence est fortement conditionnée par les évolutions géopolitiques internationales.

 

Les travaux sur les migrations au prisme du genre ont connu un nouvel essor ces dernières années (voir par exemple le séminaire animé par Camille Schmoll à l’EHESS https://enseignements.ehess.fr/2021-2022/ue/77). Les enjeux soulevés par les questions de genre et migration sont réactivés par l’exil essentiellement féminin et familial des Ukrainiens depuis 2022 qui suit une histoire migratoire, elle aussi genrée. Des économistes ont commencé à investiguer les conséquences micro et meso de la guerre et de l’exil (https://new.cepr.org/voxeu/columns/forced-displacement-gender-identity-norms-and-marital-stability-wake-war-ukraine) tandis que les organisations internationales multiplient les études sur les dimensions genrées de la crise des exilées et les vulnérabilités spécifiques qu’elles engendrent.

 

Biographie

 

Camille Schmoll est géographe, Directrice d’Études à l’EHESS et membre de l’UMR Géographie-cités. Ses travaux portent sur les migrations européennes et méditerranéennes, le genre et les migrations, les différentes formes de mobilité et leurs croisements, les transformations urbaines induites par les mobilités, les approches réflexives dans les études migratoires et les méthodes qualitatives d’enquête en géographie.