Pour l’édition 2024 des Rencontres de la Fondation, en complément de la journée du 13 novembre, la Fondation Croix-Rouge française a organisé une soirée spéciale sur les recherches menées sur l’accueil des exilés d’Ukraine en France, qui s’est tenue à la Gaîté Lyrique, à Paris, le mardi 10 décembre 2024 de 18h à 21h30.
Intitulé « Réinventer l’accueil des réfugiés en France : gouvernance, santé et logement. Quelles leçons tirées des exilés de l’Ukraine ? », cet événement a été l’occasion de croiser les connaissances scientifiques avec les réalités des défis opérationnels. Six chercheurs lauréats d’une bourse de recherche de la Fondation, ainsi que plusieurs professionnels de la Croix-Rouge française ont partagé et mis en perspective leurs expertises au cours de deux tables rondes. Modérées par Marie-Caroline Saglio-Yatzimirsky, directrice de l’Institut Convergences Migrations, celles-ci ont abordé les enjeux liés à la gouvernance, à la santé et au logement, en s’appuyant sur des expériences et des études récentes.
L’événement a débuté par une intervention de Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche émérite au CNRS, qui a présenté le contexte général des migrations en France. Elle a souligné les enjeux humanitaires posés par l’accueil des réfugiés ukrainiens et la nécessité d’en tirer des enseignements pour les politiques publiques.
La première table ronde, dédiée à la santé des réfugiés ukrainiens, a permis d’examiner les défis spécifiques auxquels ces derniers sont confrontés. Elle a réuni cinq panélistes :
- Ludovic Joxe, docteur en sociologie, qui a mis en lumière les obstacles à la continuité des parcours de soins pour les exilés ukrainiens, liés à des barrières administratives et culturelles.
- Armelle Klein, également sociologue, qui a exploré les vulnérabilités particulières des réfugiés, notamment l’insuffisance de prise en compte de leurs besoins spécifiques et le manque de personnels qualifiés pour y répondre.
- Giovanni Matera, sociologue, qui s’est penché sur les risques d’invisibilisation des problèmes de santé mentale chez ces populations, souvent ignorés dans les dispositifs d’accueil classiques.
- Tétiana Stoianova, docteure en droit, qui a présenté ses travaux sur les effets de l’isolement social, notamment en matière de santé mentale et de violence domestique, tout en proposant des outils d’évaluation adaptés aux réfugiés ukrainiens.
- Manon Ebras, responsable du programme Croix-Rouge Initiatives à la Croix-Rouge française, a clôturé cette table ronde en apportant un éclairage opérationnel sur les actions menées par l’organisation.
La deuxième table ronde s’est concentrée sur la gouvernance et les modalités d’un accueil qui, de par son caractère exceptionnel mais aussi limité, interroge sur les conditions de l’asile en France. Elle a réuni quatre panélistes :
- Isabelle Delorme, historienne contemporaine, a analysé la diversité des acteurs français engagés dans l’accueil des réfugiés, soulignant l’importance de la coordination entre initiatives publiques et privées, et présenté leurs interactions qu’elle a schématisées dans un graphique synthétique.
- Jordan Pinel, géographe, a étudié l’élan de solidarité, en particulier dans les zones rurales, où l’hospitalité privée joue un rôle essentiel.
- Camille Schmoll, géographe, exploré les trajectoires d’installation des réfugiés en France, en mettant en lumière les dynamiques de migration, d’accueil et de socialisation qui favorisent leur intégration.
- Valentine Guérif, cheffe de projet « Asile et intégration des réfugiés » au sein de la filière de « Lutte contre les exclusions » de la Croix-Rouge française Responsable du projet « Safe Homes »
La vice-présidente de la Fondation Croix-Rouge, Françoise Fromageau, également présidente de la délégation régionale Bretagne de la Croix-Rouge française, a conclu l’événement en confirmant la pertinence des analyses présentées. S’appuyant sur son expérience de terrain en tant que médecin, elle a rappelé l’importance d’une approche coordonnée et inclusive pour améliorer durablement l’accueil des réfugiés.
Cet événement a permis de croiser des perspectives scientifiques, historiques et opérationnelles pour enrichir la réflexion et adapter l’action sur les politiques d’accueil en France. Les contributions des intervenants appellent à renforcer la coopération entre les acteurs institutionnels et la société civile, dans une démarche centrée sur les besoins des personnes exilées.
La Fondation partage que l’ouverture de l’événement a été marquée par une action militante imprévue dans l’auditorium où se tenaient les tables rondes, menée par le collectif Action des Jeunes du Parc de Belleville. Cette intervention avait pour objectif principal de sensibiliser le public aux conditions d’hébergement et d’accueil des mineurs isolés et d’interpeler les pouvoirs publics. La prise de parole du collectif a également marqué le début de l’occupation des locaux de la Gaîté Lyrique, avec une revendication centrale : « Avoir droit au logement, à la santé et à l’éducation », comme l’a souligné l’AFP. Suite à un espace de parole accordé par les organisateurs, le public et les intervenants et les organisateurs ont souhaité mener à bien le programme prévu en intégrant les questions soulevées en rappelant l’importance d’un dialogue respectueux.
Un grand merci à nos collègues de la Croix-Rouge ukrainienne pour les magnifiques et émouvantes photos qu’ils ont mises à notre disposition pour l’évènement et qui ont été affichées tout au long de la conférence